... - elisabeth allain: bonjour à tous. il est 13h à paris. c'est l'heure de l'info du jour. focus aujourd'hui sur ce rendez-vous voulu par emmanuel macron. le chef de l'etat réunit cet après-midi les chefs d'état-major. une trentaine de responsables militaires de l'ue ou de l'otan seront présents. objectif: avancer sur l'europe de la défense pour en définir plus concrètement les contours. et si l'avenir de l'ukraine et de l'europe se décidait aujourd'hui à paris? on posera la question à notre invité, le général de l'armée de l'air et de l'espace jean-marc vigilant. bonjour et merci d'être à nos côtés sur ce plateau. au sommaire de cette émission... derrière l'image s'intéressera à la honte de l'exil.

de retour de mission en côte d'ivoire, charlotte boitiaux nous racontera pourquoi le pays souffre encore d'une forte immigration irrégulière. journaliste à infomigrants, elle a multiplié les rencontres avec des candidats au départ pour l'eldorado européen. et puis, eux rêvent de prendre leur revanche après l'occasion manquée du match aller! les parisiens se déplacent ce soir sur la pelouse de liverpool. 8e de finale retour de la ligue des champions ce soir au stade d'anfield. les reds l'avaient emporté à la dernière minute la semaine dernière, après avoir été dominés par le psg. on aura l'occasion d'en reparler avec benoît perrochais dans "le club france 24" à 13h30. l'info du jour s'intéresse aujourd'hui à ce grand rendez-vous. les chefs d'état-major de l'ue et de l'otan sont présents à paris à l'occasion d'un forum militaire. emmanuel macron entend profiter de l'occasion pour les réunir

autour de lui. il se posera en leader sur la question de l'europe de la défense, alors que l'ue a avancé considérablement ces derniers jours. ursula von der leyen a dévoilé un plan de 800 milliards d'euros. pourquoi ce rendez-vous aujourd'hui? pour définir les contours de l'europe de la défense? en avons-nous les moyens? jusqu'où pourront aller les français et les alliés européens? on va poser ces questions à jean-marc vigilant, général de l'armée de l'air et de l'espace. au moment où ces chefs d'état-major sont présents à paris, merci d'être avec nous. le chef de l'etat profite d'une occasion définie à l'avance. il y avait un forum militaire prévu ce matin. - j.-m.vigilant: oui.

le forum international de paris pour la défense, la sécurité et la stratégie. c'est la 2e édition. c'est une conférence de sécurité internationale voulue par le ministre sébastien lecornu pour que la voix de la france soit apportée et que les français puissent exporter leurs réflexions stratégiques dans ce débat d'idées qui était jusqu'à maintenant matérialisé dans des grandes conférences comme celle de munich. elle a eu lieu il n'y a pas longtemps. il y a aussi celle de shangri-la, à singapour. c'est une opportunité pour les personnes qui, en france, mènent ces réflexions.

c'est porté par l'académie de défense de l'ecole militaire. c'est une occasion unique de confronter les idées, de développer la réflexion stratégique et de le faire dans un cadre international. le thème de ce forum de réflexion stratégique est le même que l'an dernier: "l'europe à la croisée des chemins". c'est pertinent, aujourd'hui. - elisabeth allain: le thème reste le même, mais l'actualité a bougé depuis. on a accéléré le rythme sur cette question de défense. - karim yahiaoui: oui. c'est lié aux circonstances. elles prouvent que la réflexion française est adaptée. la france promeut une autonomie stratégique européenne. nos alliés européens en comprennent la portée. jusqu'à maintenant, ils étaient focalisés sur l'idée de garder les américains engagés. nous nous faisons les avocats de cette autonomie stratégique européenne. nos alliés avaient peur que ça incite les américains à partir. indépendamment de notre position, ils ont leur propre agenda et leurs intérêts qui sont globaux, et nous devons le comprendre. nous avons souvent le sentiment d'être au centre de leurs préoccupations. c'est faux.

les etats-unis sont une puissance globale. toutes les crises à la surface de la terre sont connectées entre elles. aujourd'hui, nous assistons à la concrétisation de ce qui avait été initié par l'administration obama. il y a une bascule des intérêts géostratégiques des etats-unis vers l'asie-pacifique. les américains ont besoin de récupérer des ressources militaires qui, à leur corps défendant, sont monopolisées sur le continent européen. - elisabeth allain: vous dites que cela était prévisible? beaucoup d'experts disent qu'on ne peut pas faire mine d'être étonnés par ce qu'il se passe, le "revirement" américain. peut-on vraiment parler de revirement? - karim yahiaoui: on le voit venir depuis longtemps. j'ai écrit un article en mai dernier à l'iris, dans lequel j'ai tenté d'expliquer que les américains

et l'otan étaient 2 choses différentes. leurs intérêts stratégiques ne sont plus alignés aux nôtres. nous n'avons plus un ennemi commun, l'union soviétique, et le champ de bataille n'est plus l'europe. je parle d'une guerre qui intéresserait les américains. on l'a vu venir depuis longtemps. le changement de grande magnitude auquel on assiste aujourd'hui est un alignement des intérêts de court terme des américains avec nos adversaires russes ou d'autres puissances autoritaires dans le monde. il y a vraiment un élément de surprise là-dessus. le désengagement de l'europe et la divergence sur les intérêts stratégiques, nous les voyons arriver depuis quelques années. - elisabeth allain: c'est quelque chose qu'on a vu venir. cette réunion des chefs d'état-major autour d'emmanuel macron aujourd'hui, ça manquait, après tous les rendez-vous qui se sont enchaînés ces derniers jours?

- j.-m.vigilant: ca s'inscrit dans la continuité des actions. il y a une prise de conscience politique. les leaders européens se sont rassemblés plusieurs fois et ont pris des décisions de grande importance. quand on voit ce que les allemands ont fait, ce changement radical de leur doctrine... ils ont annoncé qu'ils allaient modifier leur constitution pour ne plus avoir de freins budgétaires pour la dépense. ils ont annoncé un plus grand investissement dans les dépenses de défense. ca a été la même chose au niveau de l'ue. il y a des capacités de prêts ou de dépenses qui ont changé. ca n'aurait pas été possible dans un autre contexte. il y a une vraie prise de conscience. il faut que cette prise de conscience politique soit déclinée au plus bas niveau militaire. - elisabeth allain: que ce soit suivi d'effets. on dit beaucoup de choses, mais pas forcément comment on va y arriver. on est censés définir les contours de cette europe de la défense, aujourd'hui. ou au moins d'avancer. regardons quelques chiffres du réarmement nécessaire

de l'europe dans le nouveau contexte que l'on connaît. - c'était la semaine dernière. réunis en sommet extraordinaire à bruxelles, les membres de l'ue s'apprêtent à donner leur feu vert au plan de 800 milliards d'euros de la commission. un plan de réarmement ardemment défendu par la première ministre danoise. - mette frederiksen: réarmer l'europe, dépenser, dépenser pour la défense et la dissuasion... c'est le message le plus important. et il faut continuer à soutenir l'ukraine, car nous voulons la paix en europe. - face au brutal désengagement américain, alors que washington a coupé son aide à l'ukraine et engagé son rapprochement avec moscou,

l'europe a compris qu'elle n'avait d'autres choix que de renforcer les capacités militaires du vieux continent. redevenue importante depuis le début de l'invasion russe en ukraine, la défense européenne est une priorité, comme en témoignent les dépenses de défense totales des etats membres de l'ue. depuis 2021, elles ont augmenté de plus de 30 % pour atteindre 326 milliards d'euros en 2024. c'est 1,9 % du pib de l'ue. au sein des pays, de grandes disparités subsistent en défense. actuellement, les etats membres qui ont les armées les plus importantes sont la pologne, la france, l'allemagne et l'italie. en termes d'effectifs, la pologne compte 202 100 militaires actifs pour 37 millions d'habitants. au 2e rang, mais considérée comme l'armée la plus puissante de l'union, la france compte 200 000 militaires, auxquels s'ajoutent 41 000 réservistes. avec plus de 83 millions d'habitants,

l'allemagne dispose de 180 600 militaires actifs et 33 000 réservistes. l'italie enregistre 165 500 militaires actifs et 18 000 réservistes pour 58 millions d'habitants. enfin, la grèce et l'espagne disposent aussi d'effectifs militaires supérieurs à 100 000 militaires actifs. les armées européennes comptent en moyenne de faibles effectifs militaires qui vont de pair avec des dépenses militaires réduites de la part des etats. ces dépenses sont amenées à augmenter pour créer une véritable europe de la défense. - elisabeth allain: on retrouve karim yahiaoui, notre envoyé spécial qui couvre pour nous cette réunion des chefs d'état-major autour du chef de l'etat. bonjour. un mot sur ce qui va se dire. on nous explique qu'il faut avancer, dessiner les contours

d'une europe de la défense. - karim yahiaoui: oui, et il faut parler d'une seule voix, car en europe, ça a souvent été la cacophonie. les chefs d'état-major vont tenter de mettre en place un plan au coeur de ces discussions. il y a une force de maintien de la paix qui ne serait pas de type finul, mais qui pourrait être amenée à agir si la paix n'était pas respectée. emmanuel macron rassemble ces chefs d'état-major, parmi lesquels les chefs d'état-major français et britannique. théoriquement, c'est eux qui parleront en premier. ce sont 2 puissances mondiales nucléaires. les gouvernements ont une ligne assez claire. il y a aussi ceux qui viennent participer à une concertation, une réflexion autour de cette éventuelle force de maintien de la paix. dans beaucoup d'esprits en europe encore, c'est la stupeur. certains etats ont du mal à se détacher de l'idée que s'il

y avait du grabuge, les etats-unis interviendraient tout de même. ce n'est pas la position de la france, omniprésente sur ce dossier depuis un certain nombre de jours. on a beaucoup vu emmanuel macron. il y aura probablement cette réflexion autour d'une force, dont l'épine dorsale se composerait sûrement de la france et de la grande-bretagne. elles devraient faire face à d'éventuelles menaces. ca pourrait être cette architecture. ce n'est pas l'otan, mais ce serait une coalition ad hoc qui pourrait émerger sans les etats-unis, avec un mode de fonctionnement qui pourrait ressembler à celui qui existe du côté de l'otan. les russes n'accepteraient pas la présence de l'otan en ukraine. il faut réfléchir à la forme et à la puissance de cette force de coalition. combien d'hommes? quels pays participent?

dans quelles zones de l'ukraine elle serait déployée? autant de questions auxquelles il faut répondre. c'est sans doute un sujet central aujourd'hui. - elisabeth allain: merci beaucoup. on vous retrouve tout au long de cette journée pour parler de l'issue de cette séquence. on vient de voir ces chiffres. les différentes forces en présence, les capacités militaires des pays membres de l'ue... la pologne, la france, l'allemagne et l'italie sont les 4 premiers. on évoque déjà une force européenne, des volontaires qui seraient tentés de s'assurer que la paix ou la trêve soit maintenue par les 2 camps. on en est là. il y aura beaucoup de volontaires? - j.-m.vigilant: il faut voir que nous sommes confrontés, en tant qu'européens, à 2 défis. a court terme, soutenir l'ukraine pour qu'elle ne perde pas

et qu'elle soit dans la meilleure position possible pour négocier. notre défi est de suppléer à la diminution du soutien américain. a plus long terme, notre défi est de repenser l'organisation de notre défense européenne. nous avions déjà des institutions qui fonctionnaient, comme l'otan. ce n'est pas une organisation américaine mais européenne. les américains y participent et dirigent à notre demande. il faut que l'on bâtisse sur ces briques pour constituer un commandement ou une capacité de décision et de planification et de commandement d'opérations militaires dans un cadre européen. - elisabeth allain: on comprend les 2 objectifs, mais il y a des priorités à fixer. la priorité, c'est quoi? on négocie à djeddah entre américains et ukrainiens. on parle de trêve.

on parle d'une coalition européenne qui jouerait le rôle d'observateur. - j.-m.vigilant: il faut qu'on ait les moyens de faire appliquer la trêve. - elisabeth allain: comment? - j.-m.vigilant: avec des forces militaires déployées dans les espaces prévus selon la trêve. on parle d'espaces maritimes et aériens, dans un premier temps. la route suivie, c'est celle de constituer une coalition avec les pays volontaires, essentiellement européens, mais pas uniquement. poutine s'opposera à "un contingent purement européen". ce sont ses mots. - elisabeth allain: c'est pour ça qu'on continue de parler avec les turcs et les canadiens? - j.-m.vigilant: ils sont dans l'otan. peut-être que d'autres pays voudront participer pour donner une dimension plus neutre à cette force. - elisabeth allain: comme qui? - j.-m.vigilant: des pays habituellement engagés

dans les forces des nations unies et qui viennent du grand sud pourraient être mis à contribution, mais je ne sais pas lesquels. - elisabeth allain: quelles seront les prérogatives de ces forces armées qui seraient déployées? "veiller à ce que la trêve soit respectée", ça veut dire quoi? - j.-m.vigilant: il faut voir l'objectif politique, les termes de la trêve qui vont être établis. pour faire respecter la trêve, il faudra définir des "règles d'engagement". c'est la traduction d'un objectif politique en règle que les militaires peuvent appliquer sur le terrain. dans quelles circonstances ils peuvent être amenés à ouvrir le feu contre une ou l'autre des parties qui ne respecterait pas ce qui a été signé? avec l'expérience des armées britannique et française,

je suis certain que nous trouverons une solution crédible et réaliste. - elisabeth allain: on lit beaucoup de choses. la tonalité est martiale. une partie des français et des européens s'inquiètent de la situation. est-ce qu'il faut s'inquiéter et avoir peur de la tournure des événements? est-ce qu'il faut se réjouir de voir que les européens ont une prise de conscience? - j.-m.vigilant: sans aller jusqu'à se réjouir, dans toutes les situations à risque, il y a des opportunités. aujourd'hui, on vit une opportunité exceptionnelle. c'est pour ça que j'engage les européens à ne pas céder à la panique ou à la peur. souvent, l'europe a un complexe d'infériorité. il est entretenu par nos compétiteurs stratégiques au travers de cette guerre de l'information. - elisabeth allain: vous dites qu'on a tendance à dire qu'on n'est pas forts. c'est un langage entretenu par les russes et les américains. - j.-m.vigilant: tout à fait.

l'europe à 27, l'ue, 2e puissance économique du monde... on ne peut pas avoir peur d'un pays qui a moins de 140 millions d'habitants et qui a un pib 5 fois inférieur. il faut qu'on se ressaisisse. il faut que dans la confrontation entre puissances, et on le voit avec ce que font les ukrainiens sur le terrain, on compte sur la force morale des citoyens. si on a la volonté de défendre nos intérêts et nos valeurs, on a tout pour le faire. - elisabeth allain: certains pays et etats de l'ue se préparent à la suite. il y a des politiques qui s'adressent à la population et qui disent qu'ils veulent doubler les capacités militaires, réinvestir davantage... les polonais, 202 000 soldats actuellement mobilisables. pour la pologne, ça ne fait aucun doute, la suite?

- j.-m.vigilant: tout dépendra de la paix négociée, ou de la trêve dans un premier temps, puis des accords de paix. une paix doit être soutenable dans la durée et pour les 2 parties. si on arrive à un mauvais accord, il sera rompu. les services néerlandais, car aujourd'hui, nous accueillons le ministre de la défense néerlandais, nous disaient que les services de renseignements estiment qu'en cas de pause, en 1 an, la russie serait capable de régénérer ses forces militaires pour menacer les frontières de l'otan. les pays baltes, par exemple. - elisabeth allain: il faut faire attention que ce ne soit pas contre-productif. - j.-m.vigilant: il faut que ça mène vers un processus de paix durable. si notre paix est une capitulation comme le demande trump

pour les ukrainiens, on prépare la prochaine guerre. - elisabeth allain: quelles garanties pourraient vous offrir la conviction qu'on va vers une paix durable? il faut faire confiance à l'interlocuteur d'en face. quand on parle aux russes, on se méfie. - j.-m.vigilant: il faut être en capacité de contrôler ce qui aura été agréé. la russie ne comprend que la force. ce ne sont pas des promesses ou des discussions. il faudra que l'on soit en capacité de déployer sur le terrain, en appui des ukrainiens, qui ont déjà une armée éprouvée mais compétente, un système défensif qui empêchera les russes de retenter ce qu'ils ont fait à moindre coût. - elisabeth allain: d'où la nécessité de booster notre capacité à nous défendre, à produire de l'armement? ca pêche, à ce niveau-là. - j.-m.vigilant: l'ue et l'europe au sens large disposent de tous les talents, des compétences et des capacités. il faut être mieux organisés.

on aura plus d'argent, mais l'argent seul ne suffit pas. il faut qu'il soit mieux dépensé. pour que la défense soit plus efficace, il faut que les besoins exprimés par les pays européens soient harmonisés pour réduire la fragmentation du marché de l'armement. - elisabeth allain: chaque etat a une expertise. il faut définir qui fait quoi? - j.-m.vigilant: il faut définir les compétences qui existent au sein de l'ue, mais aussi, et c'est là la clé du défi auquel on est confrontés... il y a une négociation inter-européenne très forte. les français sont les mieux positionnés car ils ont une base de logistique de défense complète... ce n'est pas le cas de beaucoup de pays européens. ils ont le sentiment que lorsqu'on promeut plus l'industrie de défense européenne, on fait la promotion de notre propre industrie

pour remplacer les américains. non, la france voudrait qu'il y ait plus de capacité à construire de l'armement en europe. quand on parle aux industriels eux-mêmes, ceux des sociétés privées françaises, il faut qu'ils génèrent un chiffre d'affaires. tant qu'ils n'auront pas des incitations venant du niveau supérieur, comme les etats ou les institutions européennes, ils ne pourront pas coopérer ensemble et avoir un meilleur bénéfice que si chacun reste dans son coin. il faut construire des champions pour une compétition mondiale. nous avons les talents, mais il faut dépasser ces résistances liées à une préférence nationale par rapport à l'objectif de construire quelque chose avec nos voisins et nos alliés avec qui nous partageons énormément

pour être plus forts et étendre notre marché. les industriels français se demandent souvent comment coopérer avec des pays voisins qui, dès qu'ils ont de l'argent, achètent du matériel américain. il faudrait des preuves d'amour de nos voisins européens pour qu'ils arrêtent d'avoir cette préférence pour du matériel hors de l'ue s'ils ne peuvent pas se fournir à titre national. - elisabeth allain: il nous faut une culture militaire commune. - j.-m.vigilant: une culture stratégique. si, au sein de l'ue, les pays voient le monde de la même façon, ils prendront les mêmes décisions. - elisabeth allain: c'est possible à 27? - j.-m.vigilant: c'est un chemin. on a peu de temps. on a une urgence pour réagir aux événements et à l'ukraine dans l'immédiat. la route est longue. il faut qu'on reconstruise, que l'europe renoue avec la puissance. - elisabeth allain: pour construire

cette europe de la défense, qu'emmanuel macron appelle-t-il de ses voeux? on part sur combien d'années? - j.-m.vigilant: on met 10 ans à construire une armée à partir de nouvelles capacités. ce sera un processus de long terme. on ne part pas de rien. nous avons des entreprises performantes. nous avons du personnel bien formé. nous avons des compétences qui permettent aux européens de travailler et d'opérer ensemble. il faut améliorer les systèmes pour qu'ils puissent fonctionner indépendamment des financements américains. - elisabeth allain: on voit beaucoup la france à la manoeuvre, les britanniques aussi. il faudra compter sur les français et emmanuel macron pour tenir les rênes de cette europe de la défense? - j.-m.vigilant: en tout cas, garder l'impulsion. le leadership français est reconnu. pour autant, il faudra que les français ne se mettent pas

en donneurs de leçons. il faut éviter cela. il faut expliquer aux alliés européens et les convaincre que l'on veut co-construire avec eux de nouvelles capacités européennes, et pas qu'on leur propose un plan français tout fait. - elisabeth allain: on va plutôt dans cette voie? - j.-m.vigilant: j'espère. ce qui m'inquiète, c'est que les français, nous sommes moins choqués que les autres. on a notre autonomie de réflexion depuis toujours. les alliés européens sont stupéfaits et sidérés. c'est le terme. s'ils entrevoient une petite lueur pour que les américains reviennent, ils pourraient abandonner le projet européen. - elisabeth allain: on n'est pas l'abri de ça, avec donald trump. - j.-m.vigilant: non. j'ai eu cette discussion à berlin avec des officiers allemands. ils disaient que même s'il y avait 2 % de chances

que les américains restent, ça valait le coup de continuer à leur faire la danse du ventre. - elisabeth allain: ca pourrait être un élément qui ferait que ça freinerait ce projet d'une europe de la défense? - j.-m.vigilant: ce n'est pas gagné. il faut que la france ait un rôle pour garantir que l'impulsion ne retombe pas. il en va de notre avenir et de notre sécurité. - elisabeth allain: merci d'avoir été notre invité du jour. merci pour votre expertise à l'heure de ces discussions et de ce grand rendez-vous qui aura lieu tout à l'heure autour d'emmanuel macron. on retrouvera karim yahiaoui, notre envoyé spécial. jean-marc vigilant, merci d'avoir été avec nous.